Projet barriques : 100 jours

Le retour des barriques dans le monde la bière est relativement récent (à l’exception de quelques brasseries n’ayant jamais abandonné ces contenants, comme les brasseurs de lambics autour de Bruxelles) et marque bien le balancier permanent entre tradition et modernité à l’œuvre dans l’univers de la bière Craft.

Nous sommes curieux d’expérimenter avec ces outils anciens qui reviennent sur le devant de la scène, mais en restant fidèles à nos habitudes : en privilégiant des bières de belle buvabilité plutôt que de contenu élevé en alcool, et en travaillant avec des barriques de vins français vinifiés par des vignerons reconnus, plutôt que des barriques génériques de bourbon souvent utilisées pour leur contenu d’alcool et leur rapidité à donner des arômes.

 

 

Les barriques, essentiellement en chêne, étaient le contenant historique de la bière, servant à la fois au stockage et au transport, et même au service quand les tenanciers de débits de boissons servaient les bières directement de la barrique. Le développement des cuves et fûts en inox a progressivement éclipsé les barriques: plus faciles à nettoyer, à transporter et ne conférant pas de gout à la bière, l’inox s’est imposé.

Les barriques peuvent conférer, selon leur âge et les précédents liquides contenus, des arômes de grille et de vanille caractéristiques des bois neufs, mais aussi des notes boisées plus subtiles, le caractère du précèdent contenu dans une certaine mesure, des notes oxydatives liées à la porosité plus grande des barriques, et aussi l’impact de levures ou bactéries sauvages présentes sur le bois (et qui peuvent être désirées ou non, selon l’idée du brasseur). On dit typiquement qu’un vieillissement en barriques se fait sur 4 à 12 mois pour apporter à un caractère à une bière.

 

 

Pour ceux d’entre vous qui nous suivent depuis un moment, vous savez sûrement que nous insistons sur le fait de proposer des bières fraîchement brassées et ces idées de vieillissement peuvent sembler contraires à ce principe. Les principales raisons de proposer des bières fraîchement brassées sont de mettre en avant la force de l’arôme et du goût des houblons, qui s’estompent avec le temps; et de lutter contre l’oxydation qui est toujours considerée comme un défaut pour une bière non vieillie.

Avec le vieillissement, l’idée est justement de jouer sur l’effacement progressif du caractère houblonné, en proposant des bières peu houblonnées ou en anticipant leur moindre impact, et d’intégrer l’oxydation comme un paramètre de la recette pour créer des bières avec une typicité particulière.

 

Nous avons depuis décembre une dizaine de barriques en provenance du Domaine Agape et de Chateau Meylet remplies d’une saison au houblon Aramis (que l’on retrouve dans notre Trouble #6). Nous avons également ensemencé une barrique avec des levures sauvages pour expérimenter autour d’acidités beaucoup plus marquées.

Le Domaine Agape, situé à Riquewihr en Alsace, nous a fourni différentes barriques 225l ayant contenu des pinots noirs depuis 2011 ou 2012. Chateau Meylet, pionnier de la biodynamie à Saint Emilion, nous a fourni des demi muids de 500l ayant contenu leur Saint Emilion sur deux à trois vins.

Après 3 mois, voici les conclusions que nous avons tiré de nos premières dégustations :

Les bières vieillies dans les barriques du domaine Agape présentent au nez des notes florales, délicates et très agréables.  Plus rondes en bouche que leurs consœurs vieillies en barriques Château Meylet, elles développent des acidités plus ou moins marquées en fonction des barriques.

Les Château Meylet présentent un nez plus chaud et épicé. En bouche, des notes boisées et végétales se détachent, accompagné d’une légère acidité.

 

Nous devrions récupérer de nouvelles barriques en provenance d’Alsace, de Bourgogne et du Jura dans les semaines à venir pour poursuivre nos expérimentations !

Thomas Deck
Publié le